CARRY ON MY WAYWARD SON ~

                         Marnie,

       Je n’imagine que trop bien la question que tu dois te poser en cet instant :
« Pourquoi ? ». Pourquoi n’ai-je jamais répondu à ton dernier mail ? Pourquoi je t’envoie une lettre manuscrite ? Ainsi que pourquoi je me trouve dans le Nevada à cette époque de l’année ?
       Je vais te répondre mais avant tout autre chose : j’ai une grande nouvelle à t’apprendre. Je vais revenir à Galveston ! – Oui, tu as bien lu. C’est une décision du grand manitou en personne. Tu imagines ma joie, tout comme tu imagines le reste je suppose.
       J’ai bien cru que Fane allait déclencher une révolution lorsque le vieux Ben nous a appris la nouvelle. Ma mère n’était pas fort ravie non plus. A croire que le Nevada ne vaut pas mieux que le purgatoire à leurs yeux. Ils se sont tus durant le reste du diner mais, tu te doutes que Fane n’en ai pas resté là.
       A peine étions-nous rentrés qu’il explosé littéralement. Il hurlait. Crachant son venin contre notre père et même nos cousins. J’ai pris sur moi pour ne pas lui faire ravaler ses paroles d’un bon crochet du droit mais, ce n’a pas suffi. Lorsqu’il n’a plus eu assez de maux à vociférer contre le Nevada et sa population entière, il s’est bien entendu retourné vers moi.
D’après ses mots, je ne suis rien d’autre qu’un « traitre ».
       Mes études, mon refus – même informulé – d’épouser Soraya, notre correspondance et mes liens avec le reste de notre famille sont pour lui des actes de rébellion, de trahison. Je ne vaudrais pas mieux que tous ces badauds qui nous jugent sans savoir lorsque nous nous installons dans une nouvelle ville. Je suis un fils ingrat et arrogant qui a oublié d’où il venait.
       C’est dans cette idée qu’il a fait découvrir la gravité à mon ordinateur portable. Le pauvre n’avait rien fait de mal mais, cela ne l’a pas empêché de voler par la fenêtre et de s’écraser contre l’arbre le plus proche. Il est irrécupérable, aussi ai-je décidé d’utiliser cette bonne vieille méthode du papier et du stylo pour t’écrire ces quelques lignes.
       Malgré ces incidents, je suis impatient de poser pied à Galveston. Je n’ai pas revu Gus depuis presque un an désormais et ses imbécilités commencent à me manquer. Sans parler de ses frères, ou même Zoey (de ce que je sais, elle vit chez eux pour la durée du voyage de notre père et de sa mère en Europe). Mais, plus que tout j’ai hâte de pouvoir te retrouver enfin en chair et en os ! Six ans c’est long, beaucoup trop long.
       Je te préviendrai d’un texto de mon arrivée – si d’ici là bien entendu Fane n’a pas poursuivi sa vendetta contre la technologie !

                                                                           Je t’embrasse.

                                                  Jake.